Elles racontent le monde d’après !

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Le Selflove Gang fait sa Une !

Nous avons invité des militantes à raconter le monde d’après, un monde où chacun·e aura vraiment voix au chapitre !

Avec sa Une, Le Parisien nous a une fois de plus démontré l’omniprésence de la parole des hommes. Cette parole masculine blanche est exclusive et distribuée à tout va sans même que les hommes aient parfois une quelconque expertise sur le sujet sur lequel on les invite à parler.

Pour cela, le Selflove Gang souhaite rééquilibrer le débat public monolithique actuel et donner aux femmes* toute la place et la légitimité qui leur reviennent ! Voici le monde d’après par 4 femmes militantes écologistes, féministes et antiracistes. Merci à Stéphanie, Zoé, Sophie et Shahin pour leur contribution.

 

Stéphanie Ngalula Mukadi, citoyenne afropéenne, militante féministe intersectionnelle, activiste décoloniale

Le monde d’après ne rappuiera pas simplement sur play après avoir été en pause. Le monde d’après aura un peuple nouveau, une génération survivante de la crise et immunisée contre l’inaction. Le véritable monde d’après ne saurait commencer qu’à l’issue d’un reboote sans concession de nos manières d’envisager nos rapports au monde du travail, sociaux, ethniques, de genre, de validisme, économique et de classe. Le monde d’après élèvera les services publics telles que la santé et l’éducation au rang d’intouchable (et non plus de simples variables d’ajustement budgétaire).

Le monde d’après regardera en face son héritage patriarcale, son histoire d’asservissement, ses reliques coloniales, ses réflexes racistes. Il en finira avec les coûts de la charge sociale, son mépris de la santé mentale, sa course effrénée vers la déforestation et le déséquilibre des écosystèmes impactant en premier les plus vulnérables d’entre nous.

Le monde d’après s’affranchira de l’entre-soi toxique qui marginalise les récits et autres vécus qui ne sauraient rentrés dans le moule de la pseudo neutralité.

Le monde d’après n’aura pas besoin d’une crise pour reconnaître la place et la valeur des forces vives qui font tenir notre société et honorer leur dignité. Le monde d’après témoignera activement sa solidarité – au-delà des applaudissements et autres chants aux balcons – avec celles et ceux qui crient leur souffrance-besoins, réclament la prise en compte de leur luttes légitimes – et se voient retorquer pour seule réponse la désobligeance et l’arrogance d’une élite en déconnection.

Zoé Genot, députée Bruxelloise Ecolo depuis le 25 mai 2014 et ancienne députée fédérale

L’après-confinement, les SDF de nouveau dans la rue ?

Une large part de notre communauté est enfin conscientisée à la nécessité d’assurer l’essentiel à tous : une alimentation de qualité, accessible et relocalisée, des soins de santé pour tous, un logement décent et payable, la possibilité de se déplacer sans hypothéquer la planète. Face à la crise les personnes de la rue sont accueillies au Samu Social, à la porte d’Ulysse, dans les 260 lits médicaux supervisés. Mais aussi pour 726 d’entre eux dans des hôtels. Encadrés par des intervenants·es sociaux et santé, les équipes des hôtels, des associations qui cuisinent, des travailleurs·ses communaux bricolant dans l’urgence, et nous les en remercions.

Quand le déconfinement commencera, les frontières seront probablement fermées et les touristes ne vont pas se ruer pour faire du tourisme à Bruxelles. Mais les administrations réouvriront, les travailleurs·ses du social pourront se rendre dans chacune de ses chambres, discuter avec chaque SDF, les découvrir dans leurs envies, leurs récits, leurs complexités administratives et leurs besoins santé. Et un grand programme d’ Housing First pourrait leur être proposé : chercher des logements, les leur proposer, les soutenir dans la remise en ordre administrative et l’accès à des revenus de remplacements, un véritable suivi en logement adapté aux besoins… Mais pour que nous puissions vraiment rêver à un soutien de tous ces hébergés, il faudra aussi une nécessaire opération de régularisation sinon une large part du public de la rue y retournera…

Alors oui nous pouvons rêver, et certains de nos rêves doivent même devenir une réalité !

Sophie Poidlins, militante et chargée de projets fédéraux chez écolo j

Demain lorsque nous arrêterons d’applaudir, il faudra faire un choix politique et passer à l’action.

Depuis des années pour certains mais collectivement depuis le début de cette crise, on prend conscience de l’absurdité du monde dans lequel nous vivons : inégalités sociales, course au profit, austérité, productivité, exploitation de l’humain et de la nature, etc.

Notre modèle de société est fragile, nous sommes vulnérables. Malheureusement, demain, les rapports de force n’auront pas disparu. Il faudra lutter pour voir émerger la société que nous voulons : une société juste, équitable, inclusive, démocratique, sortie du système capitaliste-patriarcal et qui réinvestit le service public et les politiques sociales. Cette crise, en permettant au plus privilégiés.es d’entre nous de ralentir et de voir diminuer leur charge de travail, est l’occasion de rappeler une mesure urgente à mettre en place pour tous·tes : la réduction collective du temps de travail. Cette mesure permettra une répartition de l’emploi mais aussi d’avoir du temps pour soi et du temps pour remettre en question notre modèle de société.

Demain, nous devrons nous organiser à travers les mouvement sociaux et ainsi avoir voix au chapitre. Demain, il ne faudra pas oublier cette crise, la réalité à laquelle elle nous confronte et notre colère ! Il ne faudra pas accepter « de faire des efforts et des sacrifices ». Demain, il faudra se battre et marteler que « c’est une bande de femmes* qui fait tenir la société.

Shahin Mohammad, militante féministe intersectionnelle, employée de Garance absl et des Petits Riens asbl et cheffe de groupe Ecolo à Anderlecht

Un petit virus vient chambouler nos vies : privés·es de nos libertés du jour au lendemain, assignés·es à résidence avec la maxime « prenez soin de vous, tout ira bien… ».

Sauf que l’état providence a oublié ses lunettes intersectionnelles : le Covid-19 amplifie des inégalités sociales préexistantes, engendrées par un système capitaliste patriarcal, classiste, raciste, validiste, sexiste et hétéro-normé dont l’un des fers de lance est de briser les solidarités, en exploitant et opprimant ceux qui n’entrent pas dans la norme « capital-profit ».

Mes pensées vont aux victimes collatérales de ce clivage : enfants en institution ou victimes de violences, femmes victimes de violences conjugales, familles précarisées, personnes âgées et handicapées en grande dépendance, personnes Sourdes, en prison, sans-abri, migrants·es, sans-papiers, les TDS…  Toutes oubliées ou considérées comme non-prioritaires. Heureusement, la solidarité citoyenne veille : les couturières à leurs machines, les bénévoles en action. Facebook a très vite vu fleurir des dizaines et groupes et de pages de solidarité, des personnes sont devenues des lanceuses d’alerte,… Ces citoyens·nes, en acceptant un jeu dont iels ne détiennent pas les règles, sont devenus·es des piliers fondamentaux de cette crise. Elles méritent autant nos applaudissements.

Maintenant, il est certain que nous sortirons divisés·es de la crise.

Dans le monde d’après, le défi de la solidarité deviendra l’enjeu central : Demain, Parviendrons-nous à faire perdurer les mesures mises en place pour les personnes sans-abris ? L’interprétation et la visibilisation de la langue des signes se poursuivra-t-elle ? Scanderons-nous le refinancement urgent de la santé ?

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