La sécurité sociale, l’édito

Plus d’un an après le début de la première pandémie mondiale contemporaine, quoi de plus à propos que de se pencher sur l’invention du siècle dernier la plus humaine et la plus révolutionnaire : la Sécurité Sociale.

Comme Mathilde nous l’explique dans son article retraçant l’histoire de la Sécurité Sociale, ce monument du patrimoine immatériel de l’intelligence humaine est plutôt récent dans l’Histoire politique. Mais il est surtout le fruit d’une longue bataille des travailleur·ses contre leurs conditions d’existences indignes et pour la reconnaissance de leurs droits. La preuve s’il en fallait qu’aucun changement de système radical comme celui-ci ne s’obtient, ou plutôt ne s’arrache, sans luttes sociales et sans exigences toutes aussi radicales.

Le contexte de construction de ce modèle, qui nous permet à tou·te·s de ne pas devoir choisir entre nos besoins de bases (être bien nourri·e ou en bonne santé, avoir accès à un logement ou se soigner, pouvoir se former ou payer ses factures d’hôpital…), fait tristement écho à notre époque : La crise sanitaire de la COVID a mis en difficulté des millions de personnes (pertes d’emplois, privation d’activités et difficultés socio-économiques qui en découlent). Les répercussions de cette crise et des mesures qui ont dû être prises pour tenter d’y répondre (et ce compris en termes de santé mentale !) commencent à s’abattre sur nous telle une réplique de séisme.

Mais surtout, la COVID a révélé avec une clarté inédite (ce que beaucoup savaient déjà) à quel points les dernières décennies de néo-libéralisme n’ont cessé de saper les bases même de la solidarité organisée (en même temps que de détruire la planète, d’asservir les corps féminins et racisés, de cadenasser toujours plus les contestations par la logique sécuritaire).

Cette pandémie devrait en avoir logiquement montré l’inconséquence et avoir permis de remettre la focale sur la résilience et la coopération.
Et pourtant. La remontée du fascisme et des discours réactionnaires ne semble pas prête de s’endiguer.
Du côté des systèmes de protection sociale, le règne de la mise à l’abri individuelle et la loi de la capitalisation continuent de se jouer, comme nous l’explique Marie-Anaïs dans son analyse de l’épargne-pension.

Comme le met en exergue l’entretien réalisé par Arthur autour de la réponse européenne face à la crise : l’enjeu présent est sans doute de saisir l’occasion historique de solidifier ce droit universel à des conditions de vies dignes. Et qui sait.. de l’étendre (par l’instauration d’un salaire étudiant ou d’un revenu de base universel suffisant ou encore par l’individualisation totale des droits sociaux, par exemple).

Au vue des défis sociaux, des difficultés démocratiques, des effondrement climatiques et écologiques qui nous attendent, le 21ème siècle a résolument besoin de sa propre révolution sociale !

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Cloé Devalckeneer, rédactrice en chef