Quand écolo j repense l’école, elle s’inspire des classes vertes

C’est bien plus qu’une boutade d’écologistes.

Les classes vertes sont un modèle d’enseignement qui offre de multiples lâcher-prises, véritable alternative à la manière traditionnelle d’enseigner… On aurait tort de ne pas s’en inspirer pour repenser l’école.

Qui a eu cette idée folle, un jour, d’inventer l’école ? C’est ce sacré Charlemagne, nous répond la chanson. Pourtant, si la société a bien changé, l’obligation scolaire, elle, est toujours bien là.

L’école devrait être un ascenseur social. C’est la mission que la société lui donne. Elle devrait donner à chaque enfant sa chance de réussir dans la vie. Mais, reconnaissons-le, le contexte familial a toujours été, et de tous temps, un facteur discriminant. Dans une société néolibérale comme la nôtre, réussir met d’autant plus les acteurs en concurrence. Enseigner s’exprime souvent en termes de sélection, d’élimination. En découle alors la relégation et l’échec. Des réalités que l’on connaît dans le monde du travail mais qui, très tôt sont déjà vécues à l’école. Tentant de rompre avec cet atavisme sociétal, le décret qui organise la mixité sociale à l’école est très généreux. Mais concrètement, l’école fonctionne avec des règles qui piègent encore rapidement ceux qui ne sont pas issus d’un milieu cultivé.
Les filières sont là, qui organisent la relégation : général, transition technique, de qualification et enseignement professionnel… le parcours est tracé et semble dire que, progressivement, on descend au bas de l’échelle sociale.

La glissade commence si votre profil n’est pas dans l’alignement du groupe

Derrière cette consigne Je ne veux voir qu’une seule tête, le système attend que tous, au même rythme et avec la même facilité, accèdent à l’appropriation des mêmes contenus, pour la plupart, des savoirs savants. Bien sûr, en primaire, puis en humanités, cela reste modeste… mais qu’il s’agisse de Mathématiques, de Sciences, d’Économie ou de Langues anciennes… on est en présence de connaissances présentées de façon très peu empirique, la finalité des études étant bien de constituer un corpus théorique de matières pour vous introduire à l’enseignement universitaire. Si vous n’êtes pas faits pour le général, il vous est loisible de bifurquer vers un enseignement plus technique où les compétences seront sans doute plus à votre portée. Mais l’enseignement supérieur et l’accès à des fonctions de cadres seront moins aisés. Pour ceux qui sont plutôt manuels, dira-t-on, il reste un enseignement adapté que vous pouvez suivre en plein exercice ou en alternance. N’a-t-on pas besoin de bons plombiers ou mécaniciens ? Est-ce si dégradant d’être boucher ou boulanger ?

Que l’on soit élève ou enseignant, l’école est un système qui organise, qui standardise, qui duplique, qui sélectionne

Il faut calquer son temps sur celui du groupe. Se conformer à une gestion de l’espace et des rythmes d’apprentissages que l’on croit bons pour tous. Dans l’enseignement général, la plupart du temps, on fait abstraction de la finalité de ce que l’on apprend pour reporter à plus tard, dans la vraie vie, le sens de ce que l’on construit. Une abstraction qui est à la portée de certains, mais totalement inaccessible pour d’autres.

Et pourtant, il y a bien un socle commun, constitué de savoirs, de savoir-faire et de savoir-être qui pourrait être appréhendé par chacun, avant que des filières n’embarquent dans des parcours plus spécialisés. Le Pacte d’excellence le reconnaît finalement quand il parle de tronc commun polytechnique. Espérons son installation prochaine. Mais ce n’est pas tout.

Souhaiter un autre cadre que les quatre murs de la classe et son temps découpé en heures de 50 minutes

Réclamer de pouvoir bouger et prétendre que l’on n’apprend véritablement que dans l’action. Affirmer que l’on a des intelligences multiples et que, dans la réalisation d’un projet collectif, tous ne doivent pas nécessairement savoir faire la même chose, mais qu’il s’agit surtout d’apprendre à travailler ensemble, à collaborer… Tout cela est toujours bien hors norme à l’école. Juste peut-être lors des classes vertes, quand il semble que l’on puisse relâcher la pression et, que les enseignants travaillant en équipes, on part de situations de terrain pour apprendre de façon interdisciplinaire les choses de la vie.

Au retour des classes vertes les enfants sont enthousiastes… Posez-leur alors la question de cette autre chanson : Qu’as-tu appris à l’école, mon fils ?… Ils n’auront de cesse de vous dire combien c’était passionnant d’apprendre avec Monsieur, avec Madame, en menant des projets bien intéressants.  Et pourquoi cela ne serait Freinetique1 que dans l’enseignement fondamental ? A moins, bien sûr, qu’au Secondaire, le plaisir d’apprendre soit, lui aussi, secondaire !

Michel Berhin

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1 Célestin Baptistin Freinet est un pédagogue français du début du XXème siècle

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