Violences en tous genres

Nous sommes le 3 novembre 2019, et je lis sur les réseaux sociaux qu’Aurélie a été tuée sous les coups de son mari. Ce sont des coups de brique et de couteau qui se cachent sous les coups.

Le 6 novembre, c’est au tour de Jill de succomber. Le dimanche suivant, Sylvie y passera aussi.

Ces meurtres, vulgairement classés comme faits divers, se regroupent sous le terme féminicide. Le féminicide, c’est assassiner une femme en raison de son identité de genre, et le terme n’est à l’heure actuelle toujours pas reconnu dans la majeure partie du monde.

Chaque jour, nous pouvons lire bon nombre d’histoires sordides de femmes violées, violentées, tuées, victimes de mutilations génitales, d’interdiction d’avorter, d’avortements forcés ou encore de mariages arrangés. Les violences envers les femmes ne sont pas nouvelles, et ont même été la norme durant de longues années. Quelle que soit leur nature, ces violences subsistent.

En regardant en face, suivant la dualité si tranchée que les médias imposent encore souvent à l’identité de genre, les violences faites aux hommes sont elles aussi présentes, et pourtant tristement tues. Les hommes représentent 27% des cas enregistrés par les associations venant en aide aux victimes de violences conjugales. En 2016 en France, là où tous les trois jours, une femme mourait des suites de violence, c’est tous les 11 jours qu’un homme décédait de violences conjugales. Du point de vue des violences physiques et psychologiques, ce n’est donc pas non plus la joie pour nos homologues masculins…

Mais donc, l’égalité, on y est ou pas encore ?

Faisons le point en Belgique en quelques chiffres sur l’égalité hommes-femmes…

• Une femme gagne en moyenne 2.771€ contre 3.108€ pour un homme (salaire brut).

• Le congé de paternité est de 10 jours, contre 15 semaines pour le congé de maternité.

• En 2018, 26% des femmes entre 20 et 49 ans, sans enfant, travaillent à temps partiel, contre 7% des hommes. Dans la même tranche d’âge, lorsqu’on parle de 3 enfants ou plus, ce chiffre grimpe jusqu’à 52% pour les femmes, contre 9% pour les hommes (Eurostat).

• La part des tâches domestiques exécutées par les femmes représente 72%.

Bon, pour l’égalité dans notre société actuelle donc, on repassera, et les inégalités sont aussi en défaveur des hommes…

De l’opprimé à l’oppresseur ?

Le féminisme est défini comme un mouvement militant pour l’amélioration et l’extension du rôle et des droits des femmes dans la société qui comprend aujourd’hui une dimension qui se veut plus généralement égalitaire. Nous ne militons plus uniquement pour l’amélioration des conditions de la femme, mais pour l’égalité des genres, quel que soit le genre, puisque nous comprenons aussi que le genre n’est plus simplement dichotomique.

Un des problèmes avec le féminisme actuel est qu’il y a finalement peu de consensus en ce qui concerne la définition, dû à la multiplicité des combats qui se retrouvent englobés par le terme. Arrivent alors les raccourcis du type les femmes veulent prendre le pouvoir, et les genres autres que le genre féminin peuvent vite se sentir lésés dans ce combat qui ne semble concerner finalement que les femmes, ou autrement dit, pour reprendre les termes de Karen Offen, c’est une histoire de femmes, par les femmes, sur les femmes et pour les femmes. En arriverait-on à une sorte de violence symbolique inversée ?

Parmi les conséquences malheureuses qui en découlent, nous retrouvons une sorte d’effet rebond, donnant naissance à un mouvement appelé masculinisme, qui promeut la position dominante des hommes dans la société, s’apparentant alors à une sorte d’anti-féminisme. Dans une sorte d’entre-deux s’est aussi fondé l’hominisme, défini comme un mouvement se préoccupant de la condition masculine, mais aussi de la condition féminine, et de celle des enfants. Cela rappelle toutefois ce qui est englobé dans le féminisme mais sous un autre terme, chaque genre tirant alors la couverture de son côté pour décider d’un juste mot, pour globalement dire la même chose…

Les termes et les mouvements se multiplient, jusqu’à créer des camps qui s’opposent parfois violemment. Il serait probablement temps d’arrêter de nous battre les un·e·s contre les autres, et d’enfin militer tou·te·s ensemble pour un monde où chacun·e peut avoir sa place, avec les mêmes droits et opportunités, peu importe son genre.

Sarah de Jong