En cette période pré-électorale, tout le monde s’accorde sur la nécessité d’en faire plus en matière climatique
Mais lorsque vient le moment d’agir, certain·e·s responsables politiques se retranchent derrière l’argument du coût de la transition écologique. Pourtant, de nombreuses solutions existent pour la financer.
Parmi d’autres, le Pacte européen Finance-Climat, un plan Marshall pour le climat qui entend mobiliser la création monétaire.
Le 29 janvier dernier, à la suite de sa rencontre avec la Coalition pour le Climat, Charles Michel déclarait : « je ne vois pas de formule magique dans les propositions qui sont sur la table… parce qu’il n’y en a pas. Il ne suffit pas de claquer des doigts pour que pleuvent les milliards qui nous permettront de financer les mesures ».
Face à cet argumentaire, l’économiste Pierre Larrouturou et le climatologue Jean Jouzel proposent un Pacte Finance-Climat, basé sur le slogan « si le climat était une banque, on l’aurait déjà sauvé ».
Pire, selon l’économiste, 90% des sommes créées par la BCE ont alimenté la spéculation boursière entre 2015 et 2018 (voir article création monétaire).
Concrètement, les initiateurs de ce Pacte Finance-Climat plaident pour la création d’une Banque européenne du climat et la biodiversité (BECB), qui financerait la transition écologique à travers la Banque Européenne d’Investissement. Chaque année, la BECB allouerait aux états membres de l’UE des prêts à taux zéro pour un montant équivalent à 2% de leur PIB. Ainsi, la Belgique bénéficierait chaque année d’une enveloppe de 8,5 milliards d’euros.
Par ailleurs, ils entendent créer un Fonds européen du climat et la biodiversité (FECB). Ce fonds, dont le budget s’élèverait à 100 milliards d’euros par an, serait alimenté par les entreprises opérant dans l’UE – hors artisans et PME – à concurrence de 1% à 5%, suivant leurs performances environnementales. Ce montant serait destiné à financer la transition écologique en Europe mais aussi en Afrique.
Évidemment, ces prêts ne pourraient financer que des dépenses en lien avec la transition écologique et solidaire
Certain·e·s, comme André Peters (candidat sur la liste Ecolo fédérale à Bruxelles et auteur d’un livre sur le sujet) ajoutent que les titres de dette publique déjà détenus par la BCE pourraient aussi être convertis en prêts perpétuels à 0%, ce qui revient à annuler ces dettes sans détruire la masse monétaire déjà en circulation.
La solution paraît presque invraisemblable tant elle est simple. Mais alors, qu’est-ce qu’on attend ?
Les économistes libéraux – les orthodoxes – (dont certain·e·s étaient d’ailleurs déjà hostiles à l’assouplissement quantitatif) prétendent que la proposition mènerait immanquablement à une inflation hors de contrôle, à une distorsion des prix, à un relâchement du contrôle budgétaire des états membres et à une instabilité du système financier au détriment des épargnant·e·s et pensionné·e·s du Nord de l’Europe.
Mais ces objections ne tiennent pas vraiment la route. Même avec 2600 milliards d’euros d’assouplissement quantitatif en quatre ans, le niveau d’inflation de la zone euro reste (désespérément) inférieur à l’objectif de 2 pourcents assigné à la BCE. Quant à l’instabilité financière, il y a fort à parier que c’est l’inaction des états en matière de lutte contre le réchauffement climatique qui la causera, bien plus que des investissements dans des infrastructures publiques.
Sans doute, le vrai problème des opposants à la Banque climat se trouve-t-il ailleurs
Créer pareille Banque, c’est assigner à nouveau aux pouvoirs publics un rôle prépondérant dans l’économie. Et ça, idéologiquement ça ne passe pas lorsqu’on prétend que ce sont les marchés qui doivent déterminer la marche de l’économie…
L’argument du coût de la transition est trompeur, voire fallacieux. Ce ne sont pas les solutions qui manquent. En matière d’écologie comme dans d’autres domaines, ce qu’il manque, c’est une véritable volonté politique.
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Sources
https://www.pacte-climat.net/en
https://www.lecho.be/opinions/carte-blanche/Il-est-temps-de-renflouer-le-climat/10107731
https://www.taurillon.org/que-propose-le-pacte-finance-climat
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Lionel Legrand et Lucien Standaert